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Et si les europhiles reprenaient quelques bases de philo ?

Auteur : Raphaël Pomey | Depuis vendredi 13 juin, un tir de barrage verbal s’abat sur ceux qui osent encore défendre la souveraineté suisse. L’analyse des « éléments de langage » des partisans de la soumission à Bruxelles révèle une mécanique bien huilée… mais totalement contradictoire.

Si vous lisez ces lignes, il y a fort à parier que vous n’êtes plus de petits écoliers à qui l’on doit faire la leçon. Pourtant, quelques heures après la publication du contenu des accords de soumission à l’UE, une journaliste de la RTS ne prenait pas de gants pour expliquer au public qui sont les bons élèves et qui sont les cancres du dossier européen.

Dans Forum, une correspondante au Palais fédéral décrivait les moyens par lesquels notre gouvernement comptait « amadouer les opposants » (sic) afin de leur faire avaler le paquet d’accords Suisse-UE. On apprenait aussi qu’Ignazio Cassis avait décidé de faire preuve de « pédagogie » pour nous en faire apprécier les vertus.

Nous, vilains garnements

Alors puisqu’on nous parle tant de pédagogie, prenons un instant pour ouvrir le dictionnaire. L’étymologie — la science qui étudie l’origine des mots — nous apprend que pédagogie vient du grec ancien paidagogos (païs, « enfant », et agein, « conduire »). Le paidagogos, c’était à l’origine l’esclave chargé d’emmener l’enfant à l’école. Il ne faisait pas cours, il ne débattait pas : il guidait, il surveillait, et parfois, il corrigeait.

Voilà donc ce que certains ont en tête quand ils promettent de « faire de la pédagogie » :  ramener le peuple, gentiment mais fermement, dans le droit chemin. Ce n’est pas un dialogue, c’est un encadrement. Pas un débat, mais une marche forcée avec le sourire. On aurait pu espérer un peu plus de respect pour un peuple adulte, capable de discernement.

Et puisque nous sommes renvoyés à nos pupitres, restons-y encore un instant. Un vieux principe de la philosophie occidentale s’appelle le principe de non-contradiction. Aristote — sans doute boudé par nos élus — l’énonçait déjà : « Une chose ne peut à la fois être et ne pas être, sous le même rapport. »

Être ou ne pas être…

Un exemple : on ne peut pas, en même temps, affirmer que ces accords sont « comme le serment du Grütli » (Beat Jans, SonntagsBlick) et qu’ils « ne constituent pas un tournant de la politique étrangère suisse » (Ignazio Cassis, en conférence de presse).

Des deux, il y en a soit un qui ment, soit un qui n’a rien compris. Problème : les deux appartiennent au même collège gouvernemental, censé défendre une ligne commune. Qui dit vrai ? Qui dit faux ? À chacun de se faire son opinion.

Mais une chose est sûre : si ces accords ne sont que la « continuité » d’une relation sur mesure avec l’Union européenne, comme le répète Cassis, alors on peut s’étonner qu’il faille sacrifier la logique la plus élémentaire pour nous les faire avaler.