Dans un communiqué de janvier, le PST-POP ne mâche pas ses mots : « L’accord porte atteinte de manière irréversible à notre souveraineté et vide de son sens notre démocratie semi-directe. » Si ce ton peut sembler inhabituel à gauche de l’échiquier politique, Leo Schmid, syndicaliste tessinois et membre du Comité directeur du PST-POP, n’y voit que pure logique : « Notre politique n’a rien d’extrême. Nous sommes une force marxiste consciente que sans souveraineté populaire, aucune rupture avec le capitalisme n’est possible. L’Union européenne est une puissance impérialiste, dirigée par le grand capital international. Elle est faite pour briser les politiques en faveur des travailleurs. »
Pour Schmid, l’Union européenne n’est rien de moins qu’une menace systémique :
« Sans souveraineté, il ne peut y avoir de démocratie. Ce traité anéantit toute perspective de transformation sociale, car le socialisme nécessite un contrôle populaire des décisions. » Ce positionnement souverainiste du PST-POP, selon lui, n’a rien de nouveau. Dès les années 1950, le parti défendait la neutralité suisse dans un monde divisé par la Guerre froide. Ce revirement stratégique marque une rupture avec la ligne des années 1990-2010, où une ouverture prudente aux accords bilatéraux avait brouillé les cartes. « Cela nous a coûté en crédibilité, notamment auprès des ouvriers. Heureusement, nous avons rectifié le tir, et notre position actuelle est claire », reconnaît-il. La question d’un soutien à l’initiative sur la neutralité, toutefois, doit encore être formellement tranchée au sein du parti.
Une alliance improbable avec la droite souverainiste ?
Interrogé sur la proximité apparente avec certains mots d’ordre de l’UDC, le syndicaliste reconnaît l’embarras que cela peut susciter au sein de sa formation : « Nous avons bien sûr des réticences à être associés à un parti xénophobe et ultralibéral comme l’UDC. Cependant, nos divergences sur ces sujets ne doivent pas nous empêcher de converger lorsqu’il s’agit de défendre la souveraineté ou de s’opposer à l’envoi d’armes en Ukraine. » Ce pragmatisme, selon lui, ne doit pas être confondu avec un alignement idéologique. La souveraineté populaire, pour le PST-POP, est un préalable à tout projet politique marxiste.
Bien que le souverainisme puisse transcender les clivages idéologiques, Kevin Grangier, coordinateur romand de Pro Suisse, met en garde contre les risques d’une alliance contre-nature. « On ne gagnera pas la votation sur la neutralité en aseptisant les discours ou en créant un mariage de raison entre souverainistes et communistes, mais parce que chacun de nous assumera son ADN politique et convaincra ses électeurs avec ses arguments propres. »
Campagne coordonnée peut-être, si le PST-POP va au bout de sa logique et se lance dans la bataille, mais pas campagne commune en définitive.
– Article de Raphaël Pomey