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Russie-OTAN, Diplomatie : À quoi s’attendaient-ils ?

Auteur : Jean-François Ramé | Depuis un an, La Suisse cherche tant bien que mal à retrouver grâce sur la scène diplomatique internationale. Depuis le début du conflit russo-ukrainien, la Russie rejette toute proposition de sommet suisse. Ce refus catégorique suscite de l’incompréhension, touchante naïveté, dans les médias, au Conseil Fédéral et dans les corps diplomatiques. Mais au fond, à quoi s’attendaient-ils ?

En 2022, la Confédération s’est alignée sur les sanctions occidentales contre la Russie, rompant avec une tradition de non-ingérence primordiale pour la Suisse. Or, imposer des sanctions économiques à un belligérant tout en prétendant jouer un rôle d’arbitre relève de l’incohérence. Résultat ? La Russie ne reconnaît plus notre pays comme une terre diplomatiquement neutre mais comme un « pays inamical » et préfère l’intervention diplomatique d’autres États pour organiser des sommets. On peut sans aucun doute éprouver de la sympathie pour un camp, mais la crédibilité d’un médiateur repose sur une impartialité à toute épreuve. Et c’est précisément ce que la Suisse a perdu.

Il serait naïf de croire que les symboles suffisent : organiser des sommets sans la participation de toutes les parties concernées ne fait pas de la Suisse une puissance diplomatique, aussi grande et symbolique que soit la réception. Le sommet Biden-Poutine à Genève en 2022 n’a pas empêché l’éclatement de la guerre quelques mois plus tard. En 2024, le Bürgenstock, sommet pour la paix très attendu, symbole de la force diplomatique suisse, s’est soldée par une rencontre clownesque, unilatérale et surtout inutile. Les lieux importent peu, seule compte la volonté de concilier les belligérants.

Le Conseil Fédéral a cédé aux pressions internationales pour imposer des sanctions. Ainsi, il affaiblit notre posture extérieure. La neutralité n’est pas un confort, mais une stratégie d’indépendance. Elle est pour la Suisse, la condition de sa sécurité, de son influence et la garantie de son identité. 

Aujourd’hui, il faut regarder la réalité en face. Notre neutralité est contestée parce qu’elle a été affaiblie par les prises de position de Berne. La Suisse n’est plus reconnue comme un acteur crédible dans la diplomatie internationale. Ce déclassement ne doit pas être nié, mais compris par tous. Et c’est précisément grâce à une prise de conscience que nous pourrons raffermir notre politique extérieure. L’Europe, d’ailleurs, en profite également et n’attends qu’un signal : si la Suisse est capable de renoncer à sa neutralité fondatrice, à quand la perte totale de sa souveraineté ? 

Redonner du sens à sa neutralité, c’est redonner à la Suisse son identité, son rôle de médiatrice, de pont entre les peuples, de voix indépendante dans un monde en guerre et polarisé. Cela demande du courage, de la cohérence, et surtout, la volonté politique de s’émanciper des pressions extérieures. Ce qui, au vu des nouveaux accords rédigés avec l’UE, ne fait malheureusement pas partie des plans du Conseil Fédéral.