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De Genève à Riyad : le grand déclassement suisse

Le PLR Alexandre de Senarclens a récemment livré un verdict implacable : « La maison Genève internationale brûle. » Tandis que le Grand Conseil genevois débloque dix millions de francs pour soutenir les ONG locales, une question demeure : cette maison brûle-t-elle sous l’effet du nouveau pouvoir américain, peu enclin à les maintenir sous perfusion, ou pour des raisons plus profondes ?

En 2021, le président de la Confédération. Guy Parmelin, et la Suisse étaient encore au centre de la table des pourparlers entre les Etats-Unis et la Russie. 4 ans plus tard, notre pays ne compte plus et a été remplacé par l’Arabie saoudite. Vous avez dit gâchis ?

Le récent choix de Trump et Poutine de se retrouver en Arabie saoudite, plutôt que sur nos terres, apporte un éclairage décisif. Six mois après le sommet du Bürgenstock, organisé par l’ex-présidente de la Confédération Viola Amherd, la Suisse n’est tout simplement plus perçue comme un partenaire crédible pour « développer une vision commune de la voie à suivre pour obtenir une paix équitable et durable en Ukraine », selon les termes du DFAE de l’époque.

La paix, c’est mieux quand on la fait à deux

Il faut dire que pour poser « la base d’un processus de paix », encore faut-il avoir les deux belligérants sous la main. Or, la Suisse, emportée par sa zelenskophilie, avait pris soin de ne pas inviter la Russie. Le résultat est sans appel : notre pays, autrefois incontournable dans la diplomatie mondiale, voit son influence s’effriter. Si les États-Unis de Trump se désintéressent de nous, ce n’est pas uniquement par cynisme, mais parce que la Suisse elle-même a renoncé à son rôle historique de médiateur.

Alors, c’est en Arabie saoudite que se déroulera la suite des événements. Il faut en saisir l’ironie : obnubilés par notre envie de poser aux côtés des figures à la mode, nous avons poussé nos ex-partenaires à se retrouver dans un pays qui est aux droits de l’homme ce que l’Eurovision est à la sobriété musicale. Comment, dès lors, ne pas sourire en découvrant le pauvre DFAE réclamer chez Watson que « l’Ukraine soit impliquée dès le début dans ces discussions, puisqu’il s’agit de son avenir » ?

Outre qu’une même logique aurait dû prévaloir au Bürgenstock, comment ne pas se demander – brutalement – qui en a encore quoi que ce soit à faire des leçons de morale du département d’Ignazio Cassis, à part peut-être Ignazio Cassis lui-même ?

On pourra toujours dépenser des millions d’argent public pour sauver la Genève internationale, mais ce sera sans effet. On peut aussi inscrire la neutralité dans notre Constitution, comme le demande Pro Suisse. Ça coûte moins cher au contribuable et ça nous évite de devenir un anachronisme.

Editorial de Raphaël Pomey